Alicia Drake signe Beautiful People chez Denoël. Un essai passionnant qui se dévore comme un roman, et vous emporte comme un polar. Il n'est pourtant pas ici question de crime ni d'assassin, mais de deux créateurs de génies qui « s'affrontent » dans un monde qui n'est pas si tendre que l'on pourrait l'imaginer. La haute couture et ses ficelles, les podiums et leurs coulisses. L'ombre et les lumières portées sur ces deux silhouettes emblématiques, sur ces deux indémodables créateurs, Karl Lagerfeld et Yves Saint Laurent. Leurs personnalités n'ont jamais été aussi justes, aussi contrastées, aussi crues que dans cet ouvrage.
Alicia Drake est vraisemblablement amoureuse de son sujet. Amoureuse de la mode, mais aussi des glorieuses années qu'elle décrit si bien. 1970 à 1980, c'est alors que tout se passe. Les jalons d'un monde encore libre sont posés, mais ce monde se fermera de plus en plus au fur et à mesure que les groupes financiers s'en rapprocheront. En quelque sorte une aube et un crépuscule amorcés dans une même décennie. On parle ici, comme l'indique le sous titre de l'ouvrage, de grandeur et de décadence, de splendeur et de misère. Excès en tous genres, drogue, sexe, et création font bon ménage dans les night clubs parisiens de l'époque. On y croise de grandes figures dont Pierre Bergé: on ne répétera jamais assez combien la mode doit à ce grand monsieur, Loulou de la Falaise, ou encore, l'intriguant Jacques de Bascher.
Un livre que l'on vous recommande vivement, foisonnant de détails. 500 pages haletantes, pleines de coups de théâtre, de rebondissements, d'illuminations, de passions et de cruautés. Alicia Drake dresse le portrait du royaume sans cesse renaissant des créateurs, et de ces deux figures, qui répétons-le ont si bien régné en partage : le génial Yves Saint Laurent, et l'incomparable Karl Lagerfeld.
«Beautiful People. Saint Laurent, Lagerfeld: splendeurs et misères de la mode», par Alicia Drake, trad. de l'américain par Bernard Cohen et Odile Demange, Denoël, 570 p., 25 euros